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analogon

14 août 2009

Apatride

p3

APATRIDE

Mes racines puisent dans la baie magnifique
Ancrées comme les pitons dix mille fois vieux
Là où croisent les sampangs et les dragons magiques
Demeure irréelle où dorment les anciens dieux.

Peuple au visage d'or sous les chapeaux de paille
Meurtri par les éclats mortels des idéaux,
Tes enfants ont cherché la paix loin des batailles
Semant des rizières vertes sous d'autres eaux.

Seul parmi la foule, pauvre au sein de l'aisance,
Que de regards, de moqueries tant méprisantes
Ont suivi les pas exilés dans votre France
Où l'on voulait trouver une terre accueillante.

Les ans ont passé, mes rides valent les vôtres,
Mais toujours le reflet révèle l'étranger.
L'habit, le métier n'y font rien, il reste un Autre
Ni chair ni poisson, toléré pas accepté.

Là-bas ou ici, quelle demeure choisir ?
La douce brise des montagnes béarnaises
M'apporte le parfum lointain des souvenirs
D'un pays perdu hors de mon âme française.

Contrat Creative Commons
This création is licensed under a Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 2.0 France License.


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23 février 2009

Eclipse

ECLIPSE

Dans les sombres pâturages du ciel étoilé,
Tandis que le pâtre solaire s’en est allé
Laissant Taureau, Capricorne et Bélier
Fouler les prés stellaires de leurs pieds,
Une étoile lentement à la vie s’éveille.
Nul ne la voit, discrète elle se glisse
Parmi les nuages d’or, entre les merveilles
De la Voie Lactée et ses infinis édifices.

Cette nuit-là solitaire je m’attardais
Sous les cieux ténébreux, guettant l’inconnu
M’échappant un instant d’une vie trop vécue
Seul le silence à mes sens subsistait.
Sur le sol, un petit homme, un moins que rien
Dans le ciel, des soleils, des astres aériens
Moi être de chair, eux chair d’éther
Rencontre du ciel et de la terre.

Mes yeux se voilent sous les lueurs écrasantes
De puissance de cette forte armada ;
Milliards de lucioles, déesses méprisantes
Dévoreuses inhumaines au sombre éclat.

Mais elle est là soudain, elle se dévoile ;
Parmi ses sœurs, venue de rien
Elle s’approche, rompant ses liens
Qui la retiennent de la céleste toile.
D’abord invisible, seule dans cette abondance
Elle va doucement, mène sa gracieuse danse
Fourbissant ses armes, vierge innocente
Mais portant en elle l’âme d’une amante.

Déjà autour d’elle le silence se fait :
Ses compagnes aperçoivent une telle rivale
Que l’infini lui-même devant elle se tait.
Elle irradie, elle domine sans égale
Elle est reine, c'est bien Elle.

A mes yeux incroyants elle se dévoile enfin
Malgré moi j’avance une tremblante main
Effleurant effrayé d’une caresse irréelle
L’étoile souveraine de mes songes, de mes nuits
Qui prend forme et renaît sous tes traits.
D’un désir abyssal ton regard luit ;
Déesse incarnée, femme dont je rêvais
Tu as quitté ton éden parnassien
Offrant à mon âme la plus belle des égéries
A mon corps la plus douce des féeries
Qu’enfin, mon désir devienne tien.

L'essence prend courbes et formes charnelles
Tu deviens l'Eve rêvée, fille sortie de l'Unique.
L'infini concentré dans ton regard cosmique
S'affranchit de ses éons et s'achève en ta prunelle.
Le ballet débute, mélange d'un corps céleste
A la douce pesanteur d'une chair terrestre
Le chant de l'étoile irise ta peau du plaisir
Quand la conjonction des sens te fait gémir.

Mais tu ignores que l'embrasement n'a qu'un temps,
Pour toi l'éternité est la seule mesure éloquente
Mon âme tellurique te semble aussi fine que le vent
Qui parcourt ta demeure aux limites inexistantes.

Lassée de mes racines terriennes, elle ferme son âme
Et s'ouvre aux clameurs élogieuses qui s'élèvent
Noyant le ressac solitaire qui éteint sa flamme
Mouchetée par la brise glorieuse de ses rêves.
Rompant le fil d'or, elle se sublime dans l'air
Traversant les strates, météore solaire
Admirée de certains, aimée voire vénérée
Elle reprend sa conquête des mondes éthérés.
A l'apogée de sa montée, une ultime fois
Elle se retourne, jaugeant l'infinitésimal
Face au grandiose, rien n'est plus pâle
Sans remords, elle s'élance vers son choix.

Les cieux obscurs soudain s'illuminent
D'or et d'opaline au passage de sa traîne,
Comète souveraine, à la grâce divine
L'espace courbe le temps devant sa reine.
Nébuleuses et poussières, amas stellaires,
Tous scintillent sur le parcours de lumière
Célébrant l'avènement et le sacre ultime
Du joyau reprenant sa place légitime.

La nuit est tombée. Seul dans ce noir,
J'aperçois l'éclat, froid ou intense,
De son être réveillé chaque soir.
Elle brille. Jusqu'à la renaissance.

Epilogue. Les enfants de Gaïa ont essaimé,
Les parsecs sont tombés, disparus à jamais.
Et chaque nuit, en tout monde conquis,
Ils la voient resplendir, éternelle et infinie.

Contrat Creative Commons
This création is licensed under a Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 2.0 France License.


17 décembre 2008

Conte de Noël


Je n'ai pas connu mon père. Tout ce que je crois savoir de lui, c'est qu'il devait être grand et brun, tout comme moi, ma mère étant elle même petite et dorée comme un croissant. En tout cas il n'était sûrement pas du genre sentimental, car il abandonna ma mère sitôt après avoir goûté à ses charmes. Jamais plus elle n'entendit parler de lui.

J'ai grandi à la campagne, dans une petite bourgade béarnaise. Les temps étaient durs alors, il fallait s'estimer heureux d'avoir un travail et une assiettée de soupe pour tout repas. A cette époque barbare, beaucoup abandonnaient les nouveaux-nés au fond d'un bois lointain, voire les supprimaient discrètement. Il n'était pas question de s'encombrer de bouches supplémentaires à nourrir, et qui le plus souvent ne rapportaient rien. J'eus la chance de ne pas subir ces désagréments ; sans doute parce que je fus le seul à naître dans le domaine cette année-là.

Dès que je pus me passer des tétées journalières, ma mère fut remise au travail. Lorsque je la voyais partir pour les champs, j'essayais bien de la suivre en m'accrochant à sa robe mordorée ; mais elle me sermonnait et me faisait comprendre que j'étais trop jeune pour travailler à ses côtés. Elle était la vachère de la ferme ; et croyez-moi, ce n'était pas de tout repos ! Il n'y avait nulle clôture pour retenir le troupeau des cinquante brouteuses indisciplinées. Dès que ces gourmandes passaient à proximité d'un champ de trèfle ou de regain, elles délaissaient les pauvres pâtures pour se jeter sur cette manne bovine. Il fallait alors de la poigne pour maîtriser ces bestioles, et ma mère ne chômait pas. Quand elle rentrait au soir, harassée et crottée de ses longues courses, elle venait tout de suite me retrouver pour m'embrasser. Elle ne le montrait pas, mais elle était toujours inquiète pour moi ; la ferme lui semblait un endroit rempli de pièges pour son pitchoun.

Je ne voyais pas du tout les choses ainsi ; durant mon enfance, je connus le Paradis dans cette ferme. Nous logions dans un appentis près de la grange. La grande cour et les nombreux bâtiments du corps de ferme formaient un terrain de jeu infini pour moi. Dès que j'étais seul, je partais en exploration découvrir ce qui me semblait un monde immense. Au début, mes premières escapades se firent de façon chancelante ; je savais à peine me déplacer debout. Mais rapidement, je pris de l'assurance et c'est en courant que je traversais la cour pour aller rendre visite à la basse-cour et embêter la volaille. J'évitais cependant les oies ; d'instinct je savais que leur bec redoutable n'hésiterait pas à me pincer, tout petit que je fusse. De même, l'étable me faisait peur. Les chevaux et les boeufs me semblaient des géants menaçants et je préférais la compagnie d'animaux moindres. Les maîtres n'avaient pas d'enfants, aussi les bêtes furent-elles mes seules compagnes de jeux. Ah ! Quelle félicité que ce temps béni où je n'étais pas plus haut que deux pommes ! Toujours le ventre plein, des caresses attendries de toutes les grandes personnes qui passaient près de moi, de longues siestes bercées par le chant idiot du coq... J'aurais voulu que cela ne cesse jamais...
Hélas... Je grandissais comme un beau diable, et un beau matin le maître me confia aux soins du garçon-vacher pour qu'il m'enseigne le métier. Catastrophe... Visiblement être un bon gardien de troupeau n'était pas inscrit dans mes gènes, car je ne pus jamais guider correctement mon troupeau. J'avais beau courir comme un fou partout, donner de la voix, menacer les vaches de représailles mordantes, rien n'y faisait. Ma mère essayait bien de me montrer l'exemple, mais ce qui semblait si naturel pour elle m'était impossible.

Il faut dire aussi que je n'étais pas toujours de la première fraîcheur quand il s'agissait de travailler. Car maintenant que mes pas se faisaient galopades, je m'étais affranchi des limites du domaine. Chaque nuit, je faisais le mur et m'évadais dans le bourg où je retrouvais de jeunes canailles comme moi. Nous formions une véritable bande, chenapans culottés qui parcouraient sous le clair de lune les rues vides. Évidemment, on ne peut faire partie d'une horde de vauriens et continuer à filer dans le droit chemin ; et fatalement, je tournais mal. Ah ! Cruel que j'étais alors ! Je revois encore les grands yeux noirs de ma mère, me supplier en silence de renoncer à mes maraudes nocturnes pour m'acquitter honnêtement de ma tâche... Mais l'appel de la nuit était plus fort que tout. Pourtant, je revenais toujours au bercail, sans doute parce que mon ventre savait que la soupe m'attendait. Mais un matin, comme je rentrais à pas de loup dans la remise pour dormir, un grand coup de sabot dans les reins me fit littéralement décoller du sol. C'était le maître de la ferme, qui, ulcéré par ma conduite, avait décidé de se débarrasser de moi. Je ne demandai pas mon reste, et filai sous les injures certes méritées des gens du domaine. Je ne revins jamais, et ne revis plus ma mère. Comme je le regrette aujourd'hui... Mais la vie de débauche était alors ma seconde mère.

Car alors, outre les larcins et les bagarres nocturnes, je découvris une occupation beaucoup plus intéressantes : les filles. Le jour où mes hormones s'éveillèrent, je ne pus plus penser à autre chose. Que m'importaient le ventre creux, les nuits glacées dégoulinantes de pluie noire, les combats sanglants... Seule comptait la conquête des belles. Leur parfum envoûtant me rendait fou, je ne pensais plus qu'à satisfaire mes pulsions animales.

Ainsi s'écoulèrent plusieurs années. J'étais plus sale que le dernier des vagabond, la barbe pendante et emmêlée, les flancs creusés par une faim sempiternelle. Du jeune mâle fier que j'étais, il ne restait que l'image d'un mendiant affamé. Peu à peu, mes envies charnelles s'espacèrent ; car au fil des ans, je n'étais plus de taille à vaincre face à de jeunes bellâtres en pleine forme, et plus aucune belle ne m'accordait ses faveurs. Alors commença une longue errance qui me mena de village en village, quémandant de-ci de-là un croûton de pain, chapardant parfois un gigot dans une cuisine désertée, mais le plus souvent réduit à fouiller les poubelles. Vous qui mangez à satiété, vous ne pouvez savoir ce qu'est la faim. Oh, non, pas la faim que vous connaissez au bout de quelques heures, mais la Faim perpétuelle, qui vous appelle chaque seconde, rythmant chacun de vos pas sur les routes de la famine. Mais on s'habitue à tout avec le temps, et la faim elle-même devint une compagne à laquelle je ne prêtais plus attention. Je n'espérais plus rien, que de me coucher un soir au fond d'une ruelle et m'endormir pour toujours.

Un jour neigeux de décembre, tandis que s'échappait des âtres des maisons une bonne odeur d'oie rôtie, je sentis toutes mes forces m'abandonner. Ne craignant plus rien que la mort, j'entrai dans une cour et me réfugiai dans la grange. Je m'allongeai dans la paille, et fermai les yeux. Je me crus revenu dans mon enfance, j'entendais les poules caqueter, la cloche sonner, et je savais que ma mère allait bientôt rentrer des champs... Alors je m'endormis heureux, croyant sentir les doux rayons du soleil pendant que le froid mortel m'envahissait.

Elle me découvrit en allant chercher des bûches dans la grange. Elle appela ses parents, qui, lisant dans ses yeux une détresse infinie, décidèrent de me porter secours. On m'emporta dans la salle commune, devant un bon feu. Lorsque je fus quelque peu réchauffé, elle me nourrit comme un enfant avec un bon bouillon chaud, puis patiemment découpa le reste de la dinde en petits morceaux que j'engloutis avidement. Je ne pus toutefois me lever tout de suite : mon corps affaibli réclama quelques jours pour retrouver de la vigueur. On me lava, on rasa ma barbe, et je rajeunis considérablement. Enfin je pus me lever et marcher aux côtés de ma bienfaitrice. Elle me fit faire le tour de la maison, puis me fit asseoir près d'elle. Dans ses yeux je lus de l'amour, et je lui accordai aussitôt le mien.
"Je t'appellerai Noël, car tu es le plus beau des cadeaux de Noël, me dit-elle toute émue.  Et tu resteras ici pour toujours avec moi !
- Ouaf !" répondis-je.

<a rel="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr/"><img alt="Contrat Creative Commons" style="border-width:0" src="http://i.creativecommons.org/l/by-nc-nd/2.0/fr/88x31.png" /></a><br />This création is licensed under a <a rel="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr/">Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 2.0 France License</a>.

4 novembre 2008

Le miroir de mes yeux

LE MIROIR DE MES YEUX

Chaque matin, ton reflet détourne tes yeux
Ne t'attardant pas sur ton visage gracieux
Tu revêts tes habits d'oubli, croyant à tort
Détourner les regards attisés par ton corps.

Tu marches tête baissée, n'osant regarder
L'émoi de ceux qui croisent ta beauté voilée
Si bien cachée sous le feu de tes longs cheveux
Tu presses le pas, n'écoutant pas les aveux.

Tout le jour tu te tiens hiératique statue
Ignorante de ton charme, seule vertu
Que tu crois s'être éloignée de toi, et pourtant
Tu en es pourvue, et cela infiniment.

Je ne suis pas un dieu, je n'ai pas de pouvoirs
Hormis ceux de mes mots, qui volent chaque soir
Tout comme une princesse, tu te veux dormante
Et moi simple chevalier je te dis ravissante.

Plus tard quand ton aimé reposera son poids
Sur ton corps alangui par de si chauds émois
Tu n'auras aucune crainte, car en ce jour
Tu seras unique, belle aux yeux de ton amour.

Ce jour-là tu te rappelleras de mes mots
Qui t'avaient dit que rien ne te ferait défaut
Alors accepte, ne serait-ce que pour moi
La douce image qu'à jamais j'aurai de toi.

Contrat Creative Commons
This création is licensed under a Creative Commons Paternité - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 2.0 France License.

16 juillet 2008

Les dieux

LES DIEUX

C'est quoi un caillou?
Plus de cent millions d'années
Et moi? rien du tout.

Quand six fois la lune aura offert sa pâleur
Et que la nature subira la chaleur
Je ne serai plus là, mais parti en fumée
Ou selon mon envie, à jamais enterré.

C'est ce qu'il me reste, six minuscules mois
Je les ai recomptés des centaines de fois.
A petits pas muets avancent les secondes
Et sans souci pour moi toujours tourne le monde.

Puis un jour, on meurt.
Et nul dieu ne vous attend
Quand est venue l'heure.

trouver                       mort

 

 

 

 

 la

perdre                          vie

POUR aller au paradis, ne gâche pas la nourRITURE
OU tu iras en enfer, ça c'est un fait étaBLI
VIlain ou gentil, choisis de qui tu seras le séiDE
glige tes prières, attention c'est l'enfer brûlANT

"Mais, Monsieur le Curé, demandait un enfant
Depuis quand les humains ont droit au Paradis?
- C'est depuis que Jésus a vaincu les tourments
Et s'en est revenu du monde de l'oubli.

- Et les Cro-Magnons? Et les Homo Erectus?
- Hum, bien sûr eux-aussi, répondit le saint homme.
- Mais alors dites-moi, si depuis toujours quoi qu'ils fussent
 Ils y allaient tout droit, je pige pas, dit le môme.
Jésus est mort pour rien, si tous peuvent y aller.
Dieu s'est-il fourvoyé, ou vous m'embobinez?
- Ne réfléchis pas tant, lui dit le sacristain.
Il te suffit de croire, c'est notre lot commun."

Non ! Cri de haine
Vole ma rage
Contre vous les hommes
Depuis toujours braves moutons

                 Dégoût des hommes
                 Ignorants, imbéciles
                 En voulant créer
                 Un monstre nommé

                 Engloutissant les âmes
                 Secrétant le poison
                 Tu ne m'inspires plus

                  L'ultime mal
                  Humanité si crédule
                  On t'a menti
                  Mais c'est toi-même
                  Muse de ta mort
                  Ennemie de tes enfants

 Allah, Yahvé ou Jésus, Krishna, le Bon Dieu
 Autant de noms donnés par l'homme pour les cieux.
 Croyances créées pour combattre notre peur
 Du néant absolu qui suit l'ultime heure.

 Rien n'est plus précieux ni rare qu'une vie
 Si riche en souvenirs, souffrances, larmes et joies
 Pesant plus que mille livres, si infinie
 Qu'on soit mendiant, enfant, poète ou bien roi.

 Chaque assassin qui tue commet un déicide
 Chaque vie perdue est un livre brûlé
 Quoi de plus destructeur pour la vie qu'un génocide
 Pensées effacées, souvenirs annihilés.

 Détruire une planète, faire naître la vie
 Tels sont les attributs possédés par le divin.
 Tous ces pouvoirs déjà dans les mains de l'humain
 Ne cherchons plus, enfin notre quête est finie.

Depuis sa venue
L'humain était le divin
Mais nul ne le crut.

 Les années ont passé, dix se sont écoulées.
 Ce forum a fermé, d'autres l'ont remplacé.
 Des membres qui postaient, certains ne sont plus là
 D'autres poursuivent ailleurs le même combat.

 La jeune fille a grandi, elle va se marier
 Les vers, les révoltes, tout ça c'est terminé.
 Se souvient-elle encore du poète aux sanglots?
 Pas plus que des autres, ils n'étaient que des mots.

 Tandis qu'à la noce les danses ont commencé
 Le soir couchant envoie ses dernières lumières
 Sur les croix et les fleurs depuis longtemps fanées
 Qui seules peuplent l'abandonné cimetière.

 Sur une pierre, on put voir naguère quelques mots
 A demi effacés, que personne ne lit
 Qui à présent se souvient encore des écrits
 De celui dont le nom était écrit dans l'eau?

Contrat Creative Commons
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10 juillet 2008

Pongo

orang_outan

PONGO

Ils arrivent. Ils vont m'avoir, je sais que le temps m'est compté. Aujourd'hui, demain, dans un mois... Je suis déjà mort, ou pire encore.  Je suis le dernier. Tout finit avec moi.

Au départ ils étaient une légende. Parfois dans les veillées on disait que certains vivaient près de nous, que ceux-là étaient pacifiques et ne cherchaient pas à interférer avec notre univers. On disait même qu'ils avaient des moeurs assez semblables aux nôtres. De temps à autre on faisait état de leur présence, mais personne n'y prêtait vraiment attention. Ils étaient comme des ombres qui vivaient en marge de nos terres.

Et puis les ombres se sont rapprochées. Au fil des ans on a soudain entendu des histoires inquiétantes. Certains d'entre nous disparaissaient, on parlait même d'attaques et de meurtres sauvages. Nous avons commencé à avoir peur. Mais nous nous sentions à l'abri dans notre forteresse verte. Nous nous trompions.

Ils ont commencé une guerre que nous avions perdu d'avance. Leur technologie, incomparablement supérieure à la nôtre, leur avait assuré la victoire dès le départ. Lentement mais inexorablement, leurs terribles machines ont envahi et détruit notre monde. Sur terre, dans les airs ou sur l'eau, ils étaient partout et leur avance progressait un peu plus chaque année. Des réfugiés ont commencé à affluer, racontant des histoires atroces. De mères massacrées sous les yeux de leurs enfants, qui étaient ensuite emmenés on ne savait où. On ne les revoyait jamais. Pourquoi faisaient-ils tout ça ? Que leur avions-nous fait, nous si paisibles qui n'aspirions qu'à une vie simple et heureuse ?  Pourquoi brûlaient-ils nos terres, éradiquant ainsi toute vie et stérilisant chaque parcelle qu'ils colonisaient ? Nous n'arrivions pas à comprendre.

... Ils arrivent. Ces dernières semaines leur assaut a été dévastateur. Nous avions beau nous dissimuler, utiliser au mieux nos capacités de camouflage, ils nous trouvaient toujours. Il y a deux jours ils ont assiégé notre refuge. J'ai réussi à m'enfuir, j'entendais derrière moi le fracas des moteurs de leurs machines tandis qu'ils mettaient à bas nos tours. Et puis les cris terrorisés des membres de ma famille ont dominé le vacarme. Je me suis bouché les oreilles et j'ai couru. Mais leurs cris résonnent encore dans ma tête. Et maintenant c'est mon tour.

Je me suis réfugié dans un abri en hauteur, mais ils nous connaissent trop bien. Ils ont scruté la canopée, utilisant des instruments optiques capables de repérer tout être vivant. Ils m'ont vite trouvé. Mes pensées affolées s'envolent dans tous les sens, tandis que je sens les vibrations atroces de leurs engins mordre mon refuge. Je sais que dans quelques instants je vais rejoindre les miens, qu'ils vont m'emmener dans leur enfer. A l'instant où tout s'effondre, où je vais toucher le sol, je croise le regard de l'un d'eux.

Mon dieu... Ses yeux...  Si cruels mais pourtant si semblables aux miens...  Quelle ironie... Sommes-nous si différents après tout ? Savent-ils qu'ils exterminent leurs frères ? Mais c'est trop tard... Qui se souviendra de notre peuple quand il aura disparu...

J'étais Pongo, le dernier homme de la forêt de Bornéo... ce qu'en malais on traduit par  "orang-outan".

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28 juin 2008

L'école du passé

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L'ECOLE DU PASSE

Malgré le ciel gris, le froid qui mordait leurs joues
Sans se plaindre ils parcouraient les chemins de terre
Sabots puis galoches qui se couvraient de boue,
Des culottes courtes qui ne protégeaient guère.

La cloche de la communale résonnait
Ils se rangeaient, les plus petits toujours devant.
Mains, oreilles et chevelure, tout y passait
Malheur aux poux, rien n'échappait à l'oeil perçant.

Au milieu des pupitres, le poêle ronflait
Allumé par son préposé hebdomadaire.
Les encriers étaient pleins, la morale attendait
Impérieuse, sur le tableau noir et austère.

Des gibecières sortaient ardoises et plumiers
Souvent de carton bouilli, et sur le buvard
Les langues se tiraient, les pleins et les déliés
Naissaient des plumes Sergent Major en grand art.

Arithmétique, dictées et leçons de choses
Ceux qui les maîtrisaient récoltaient des bons points
Pour les cancres la vie n'était pas aussi rose
Les doigts rougis par la règle ils restaient au coin.

Tout en anônnant départements et chefs-lieux
Sur les cartes Vidal-Lablache ils s'évadaient
Ils préparaient le Certificat de leur mieux
Rares étaient ceux qui par la suite continuaient.

Dans la cour, agates et calots s'échangeaient
Trésors cachés au fond de leurs poches élimées.
Au midi, la gamelle de soupe chauffait
Maigre chère pour des estomacs affamés.

Le maître, craint et respecté, dirigeait
De sa main de fer la classe de tous les âges.
Ils ôtaient le béret lorsqu'ils le rencontraient,
Le saluaient bien bas, sages comme des images.

Ces écoles et leurs maîtres ont disparu,
Maintenant enfants et parents dictent leurs lois
Tournent la tête quand ils me voient dans la rue.
Je continue, même si j'ai perdu la foi.

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16 juin 2008

Megalopolis

MEGALOPOLIS


La plaine gît écrasée, soumise sous son poids.
Agia la puissante, construite par des rois
Dévore l'espace, avalant ciel et terre;
Sa masse humiliante effraie même l'enfer.
Nulle place forte, aucune autre cité
Ne peut rivaliser, encore moins lutter.
Face à l'immonde ogresse, elles demandent l'aman
Ployant leurs sikharas, elles honorent leur thane.

Les murs plongent des airs, broient l'horizon limé
L'ellipse circonscrit son extérieur fermé.
L'enceinte écrasante absorbe toute lumière
Elle n'offre nulle part de faiblesse guerrière.
Au sein de la muraille émerge une ouverture;
Col entre deux sommets, la porte la plus dure
Jamais forgée ici enferme ce qui entre
Rien ne peut s'échapper, prisonnier de son ventre.

Les battants noirs monstrueux se joignent sans un bruit.
Gormenghast centuplé, la ville éteint la nuit.
Partout le béton, l'acier qui composent son corps
Explosent, encombrent, occupent, abhorrent
Le vide et remplissent les essarts citadins;
Le moindre monument y paraît anodin.
Les tours fières s'élèvent aux faîtes des nuages
Illuminées parfois de l'ire des orages.

Les flèches s'élancent, les parois escaladent
Mille immeubles dressés, perchés aux balustrades.
Relié par des arches, ne formant qu'un seul dôme,
Le lacis des terrasses inerve les atriums.
Des étages partent des ponts qui s'entrecroisent,
Les ogives des nefs soutiennent les ardoises
De cent basiliques aux vitraux mordorés,
Myriades de transepts battus par le borée.

Aux pieds des colosses s'enfoncent dans leur chair
Des escaliers sans fin, tombant partout des airs.
Au fil des ans la ville a conquis les abysses
Poussant ses racines qui sans arrêt s'immiscent.
Creusant, taillant le roc, les couloirs s'enchevêtrent
Labyrinthes enterrés où l'obscur est le maître.
Entre les cavernes les traboules s'enchaînent
Au fond des ténèbres parcourus par la peine.

Car ce pays des tréfonds appartient aux Proscrits
Oubliés de la surface, entachés de mépris,
Ces pauvres ilotes damnés hantent les latomies,
Ergastule maudit perdu dans l'anomie.
Leurs pauvres mains algides appellent les sportules,
Les estomacs vides des pauvres homoncules
Clament les stigmates d'une faim piaculaire
Hurlant leurs souffrances d'un cri vernaculaire.

Certains sont nés ainsi, semences rudérales
Sans espoir de sentir la douceur vespérale
D'un sommeil reposant, Sisyphes désignés,
Voués au fatum létal, Prométhées résignés.
D'autres ont été jetés par la mer de lavure
Echoués, encalminés sur cet îlot de Suburre.
Griffant les bords du puits, ils voudraient remonter
Mais seule une poignée en a la volonté.

Loin, très loin au-dessus, sous la lune gibbeuse
Les Soumis se pressent sur l'agora houleuse,
Marée de Panurge, plèbe oeuvrant sans passion
Agrandissant toujours l'infâme construction.
Ils vaquent à leurs tâches, rétribués d'une obole
Juste suffisante pour quelques joies frivoles.
Satisfaits de leur sort, sous la pluie lénifiante,
Ils se laissent porter vers la mort vivifiante.

Parfois ils s'enflamment, aspirent à l'ambroisie
Brisant les mégalithes, cherchant la parousie.
Ils se lancent à l'assaut des loggias palatiales
Ils pensent mettre à bas le logos des galgals.
Les herses s'ouvrent alors, les lansquenets jaillissent
Stipendiés pour jeter du haut du précipice
Les révoltés vaincus au pied des cariatides,
D'où coule une eau garance à l'effluve fétide.

Cachés dans la foule, ignorés du pouvoir,
Les Scaldes parcourent les sentes de l'espoir
Lapsi ou renégats, cherchant l'inférence
Du satori pour sauver leur conscience.
Contre les mercanti, les éparques nobiliaires,
Ils luttent en silence, édifiant des laraires
Pour offrir au démiurge des vers de liberté
Volant vers l'empyrée, témoins de leur fierté.

Leurs chants gagnent les voûtes, prières immarcescibles
Leur sang marque les routes, rivières incoercibles.
Devenus pérégrins, parias dans leurs maisons,
Evitant les syrtes, ils fuient la fanaison.
Au creux de leurs songes, l'alcyon s'est endormi
Couvant l'oeuf à venir des lendemains promis,
Où les chaînes brisées fleuriront d'endymions
Tandis que les hommes iront sans répression.

Dominant les à-pic, occupant chaque cîme,
Voici les Avides, imposant leur régime.
Maîtres du royaume, hautaine oligarchie,
Poursuivant le profit et chassant l'anarchie.
Leurs palais polystyles étouffent le discret,
Litée outrancière où l'or n'est pas secret.
Le somptueux s'habille pompeux de vénusté
Dont le blanc marmoréen oublie la vétusté.

Cette ploutocratie se compose d'ascètes
Grapillant chaque sou, amassant les piécettes
Ou de sybarites, goûtant tous les plaisirs
Ils s'enivrent, abusent de leurs moindres désirs
Saignant les modestes, s'abreuvant du labeur
Des bras meurtris d'en bas qui oeuvrent en douleur
Sans égards pour tous ceux qui ont nourri l'essence
De cette profusion mêlée à l'indécence.

Nulle aube sur ce monde, aucun répit offert.
Déployant leurs ailes, les Stryges ouvrent leurs serres.
Leur ronde commence, sans un bruit elles s'abattent
Inscrivant le destin sur les chairs écarlates.
Proscrits et Avides, Scaldes et Soumis mêlés,
Les mortels sont les proies de ces démons ailés.
Agia mégalopole, entité inhumaine
Continue sa croissance, à jamais notre reine.

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10 mai 2008

La proie


LA PROIE

Les gouttes s'écoulent lentement sur la glace.
Je vois cette femme esquissée dont la face
Reste immobile, muée en cire fondue
Martelée par les armes de l'amour qui tue.

Ses yeux bigarrés sont fixes, semblent sans vie
Le clin d'oeil est figé, le fard noir trop flagrant.
La joue rougie par un pinceau si écrasant
Pauvre clown maquillée par des mains haïes.

Sa lèvre perlée se fend, mais pas d'un sourire
Une main bleutée doucement essuie la trace
Qui s'écoule écarlate comme une grimace,
Rouge à lèvres témoin des instants à subir.

Elle se dénude devant moi, m'offre son corps
Aquarelle où se mêlangent la pourpre et l'or,
Témoin silencieux de l'averse journalière
Qui bientôt va s'abattre, furie meurtrière.

Au fond de ses yeux une indicible souffrance
M'appelle, gémissante, sans savoir pourquoi
Il ne s'arrête pas, prisonnier de sa transe
S'acharnant toujours plus, y trouvant de la joie.

Il ouvre la porte, elle en tremble déjà
Cachant son visage sous le poing qui se lève
Entre les coups, il n'y aura aucune trêve
Je suis cette femme, battue jusqu'au trépas.

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3 mai 2008

Un jour, ou jamais


UN JOUR, OU JAMAIS

Novice dans ce monde virtuel, tu apprends
Tout en charmant ceux qui ne voient que tes désirs
Incultes de l'âme, ils n'ont pas vu tes tourments
De tes plaisirs ils n'ont reçu que des soupirs.

Tu couchais sur tes toiles ton monde en couleur
Tu créais tes rêves, mélangeant les teintes
Une touche de rires ici, là quelques pleurs
Emplissant un océan de joies et de craintes.

Il te subjugua, emplit ton âme aux tréfonds
Te laissant affamée, sans t'abreuver d'amour
Tu restes gémissante, nul ne te répond
Tu attends et espère qu'il viendra un jour.

Je te lis, t'imagine et t'appelle de loin
Nos coeurs sont unis mais séparés pour toujours
Tu me lis, m'imagines et m'appelles néanmoins
Nos coeurs sont séparés mais unis dans l'amour.

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